Parce qu'aujourd'hui, plus que jamais, un vent froid souffle sur l'accouchement à domicile, j'ai envie de partager avec vous la naissance de ma deuxième petite fille. Parce que j'ai eu la chance d'être accompagnée par deux sage-femmes exceptionnelles, qui m'ont écoutée, soutenue, épaulée. Deux femmes, qui accompagnent jour après jour, de nombreux couples qui souhaitent mettre au monde leur enfant dans les conditions qui leur semblent les meilleures, au sein même de leur maison, si les conditions médicales le permettent, bien évidemment. Des femmes qui sont à l'écoute des femmes, des couples, des bébés. Des femmes qui font confiance aux femmes, dans leur capacité à mettre au monde leurs enfants. Des femmes qui ont coeur de respecter nos choix, nos droits, notre corps et la physiologie de l'enfantement.
Ces femmes, elles sont une petite centaine en France, à travailler sans assurance, parce que la seule qu'on leur propose, c'est une assurance dont le montant est égal voire supérieur au montant annuel de leurs honoraires! Autant dire qu'on ne leur permet pas d'exercer. Aujourd'hui, elles sont menacées de cesser leur activité si elles ne s'assurent pas, ce qui est dans la grande majorité impossible. On nous priverait donc de ce droit de choisir librement les conditions de la naissance de nos enfants. C'est tout simplement inadmissible. Il nous appartient, à nous qui tenons à sauvegarder ce droit, de défendre haut et fort nos sage-femmes et de réclamer au gouvernement qu'il agisse afin qu'une assurance soit proposée aux sage-femmes libérales accompagnant les naissances à domicile à un tarif raisonnable et en rapport avec leurs revenus.
Je compte sur vous pour signer et relayer cette pétition:
***
Samedi
20 octobre 2012. Le jour de mon terme est arrivé. 9 mois que je te
porte en moi. Je suis impatiente de te voir, les dernier jours me
semblent longs. D'autant que je crains que notre projet
d'accouchement a la maison ne puisse avoir lieu. Ma tension est assez
haute depuis quelques jours, ma sage-femme me surveille de près et
tous mes examens sont bons, j'espère donc pouvoir t'accueillir dans
les conditions que nous avons choisi.
Comme
convenu, nous nous rendons au CHU pour un contrôle. Je n'ai presque
pas de contractions, le monitoring est parfait et ma tension n'est
pas inquiétante. Je ne souhaite pas de TV (toucher
vaginal)
donc je ne sais pas où en est mon col mais bébé ne semble pas
décidé a arriver aujourd'hui. En tous cas, la SF de l'hôpital nous
assure qu'à priori rien ne nous empêche d'accoucher a la maison
(sic). Je repars confiante!
L'apres
midi, nous décidons de faire une balade dans le village tous les 3,
ton papa, ta grande sœur et moi. Tout est calme, on ne croise
presque personne, il ne fait pas très beau. On se promène assez
longtemps. Tiens,
quelques contractions me surprennent.
Ca commencerait a bouger la dedans? On rentre a la maison, et
de temps en temps, quelques contractions me demandent de m'arrêter
quelques secondes. Je vais souvent aux toilettes, et dès que je
m'assois, ça contracte assez fort. Je commence a perdre un peu de
bouchon muqueux. Je me dis que c'est peut être pour aujourd'hui sans
trop me faire d'idées. J'ai accouché apres terme pour ta grande
sœur et je m'attends a devoir patienter encore quelques jours mais
je suis tellement impatiente ! On profite de cette journée tous
les 3. J'adore les premières sensations, les premières contractons,
je me dis que tu t'apprêtes certainement a nous rejoindre, ça me
met d'excellente humeur! Nous dinons tous les 3 (une raclette!) et
j'imagine déjà que nous pourrions être 4 demain matin.
Après
manger, on entame le rituel habituel, histoires, biberon et coucher
d'E. Elle s'endort paisiblement. Mes contractions se font plus
rapprochées, plus intenses tout en étant largement supportables.
J'envoie un SMS a ma sage-femme, je lui dit que je pense que le
travail démarre. On convient de se rappeler dans la soirée. Vers
22h, j'ai toujours des contractions, le travail ne faiblit pas, ça a
l'air de vraiment se mettre en route. J'appelle la sage femme vers
23h. Je lui explique que je commence a avoir pas mal de contractions,
elle me dit qu'elle ne me sent pas encore en travail. Elle me
conseille d'essayer de dormir et de la rappeler si ça évolue. Je
vais donc me mettre au lit. Une heure plus tard, je n'arrive pas a
dormir, je suis assez excitée et j'ai régulièrement des
contractions. Vers minuit je me relève donc et je commence a
m'installer dans le salon. Lumière tamisée, bougies... Je dis a
V. de se reposer mais il a envie de préparer l'espace avec moi,
il prépare le matelas, le alèses et tout le matériel nécessaire
pour accueillir le bébé.
Vers 2h, je commence a regarder l'heure a
chaque contraction et je me rends compte qu'elles sont espacées de
3-4 minutes et qu'elles m'obligent a m'arrêter. Je rappelle ma SF,
elle me dit qu'elle me sent bien en travail et qu'elle se met en
route. Elle me propose de prendre un bain, je lui dis que je n'en ai
pas envie mais que je vais tester. Je me fais couler un bain, allume
des bougies, monte le chauffage. Mais dans le bain, les contractions
deviennent peu supportables, je me sens a l'étroit et je n'aime pas
la position. Donc je sors rapidement. Je commence a chanter pour
accompagner les contractions qui se font plus douloureuses
maintenant, elles me lancent dans les reins. Je me félicite d'avoir
suivi cet atelier de chant prénatal, chanter m'aide énormément!
Mon homme m'appuie dans le bas du dos a chaque contraction, il sait
exactement ou poser ses mains pour me soulager, quelle pression
exercer. C'est bon de l'avoir près de moi, de savoir que l'on va
mettre au monde cet enfant ensemble, a la maison. A chaque
contraction, je suis debout, Appuyée contre le mur, c'est la seule
position qui me convienne. Vers 4h, la SF arrive. Elle se joint a
nous, je suis contente de l'avoir près de nous, elle est si douce et
rassurante. Les contractions continuent leur danse régulière,
pendant longtemps elles reviendront toutes les 1-2 minutes environ.
J'avais espéré accoucher avant le matin mais je vois que le soleil
se lève, l'ambiance change, j'aurais voulu rester dans cette
ambiance feutrée, avec si peu de lumière. D'ailleurs, je ne veux
pas ouvrir les volets, je tiens a rester dans la pénombre mais je
crois que ce changement d'ambiance me perturbe. A 7h, E. se
réveille. On appelle notre amie avec qui nous avions convenu de lui
confier notre fille pendant l'accouchement si besoin. E. s'habille
rapidement, elle demande a son papa ce que je fais. Mon
homme lui répond maman chante pour faire sortir le bébé.
Ma fille vient me faire un bisous et part avec son papa rejoindre
notre amie et sa famille. Je me dis que quand elle reviendra elle
découvrira sa petite sœur!
J'ai
l'impression que le travail n'avance plus, les contractions
s'espacent, diminuent en intensité. En fait j'alterne des phases de
travail actives ou je sens que les choses avancent bien, que le bébé
descend. Je fais des aller retour aux toilettes, je vomis trois ou
quatre fois. Je me dis que c'est bon signe. Ma sage femme me rassure,
c'est long mais bébé va bien, elle l'écoute régulièrement. Mon
col est quasiment dilaté complètement. Plusieurs fois, ma SF sort
son matériel pour accueillir bébé, puis le range. Parfois j'ai
l'impression que le travail s'arrête complètement. On plaisante
tous les 3 entre les contractions. Je me dis que c'est long, trop
long! Pourquoi la poche des eaux ne se rompt pas? Pourquoi bébé ne
descend pas plus vite? Pourquoi le travail semble s'arrêter a des
moments? J'essaie différentes positions mais je ne suis bien que
debout. Je commence a avoir mal dans les cuisses. Mon homme et la SF
se relaient pour me masser le bas du dos pendant les contractions. A
un moment, mon homme enlève l'horloge de la cuisine, quelle bonne
idée, je
ne me focalise plus sur le temps qui passe mais j'en ai marre que ce
soit aussi long. Je veux accoucher aujourd'hui!!
Apres
une pause a essayer de me reposer, je me dis que c'est trop, qu'elle
doit sortir maintenant. Allez au boulot! Je me remet a marcher et le
travail redémarre, plus intense, les contractions se rapprochent,
deviennent beaucoup plus douloureuse quand tout a coup, crac! La
proche des eaux se rompt, c'est parti! Wahou,
c'est la tempête en moi, je débranche mon cerveau.
Les contractions sont tellement fortes!!! Elles m'emmenent, se
déchaînent, m'entrainent, je ne peux que les accepter en moi, me
laisser emmener par toutes ces vagues, ne pas lutter, y aller avec
elle. Mais ça fait tellement mal! Mais je sais que bientôt tu seras
la! A un moment ça y est je le sens, ça commence a pousser, ma SF
le voit et m'invite a me déplacée, je ne peux pas accoucher debout
dans la cuisine, il faut que je revienne dans le salon sur le
matelas, mais je j'ai plus rien a quoi m'accrocher sans le salon, je
suis obligée de me mettre a 4 pattes car je suis trop fatiguee pour
rester debout (position qui me permettait de mieux supporter la
douleur) et là je commence a pousser. Ça y est tu dois venir bébé,
viens, ça pousse, c'est si fort, si violent. Ça pousse et je pousse
aussi fort que je peux, bébé descend doucement. Allez viens !
Pourquoi c'est si long ?
Bientôt je sens que tu passes en moi,
ça brûle, ça fait mal: « laisse-toi traverser » me dit
ma SF. Et c'est ce que je fais. Je te laisse me traverser pour sortir
de moi, la tête, puis bientôt les épaules et flop tout ton corps
qui glisse dans les mains de ma SF. La douleur m'a un peu assommé et
je mets quelques secondes avant de retrouver mes esprits et te
prendre dans les bras. Mon petit corps tout chaud, mon bébé, mon
amour. Je regarde mon homme et je lui dis: on l'a fait mon amour! Je
le vois fourbu, fatigue mais heureux. Ça y est, on t'a accueilli a
la maison, comme on le voulait. On s'embrasse, on est heureux.
Je
vois ma SF les yeux embuées, elle est très émue elle aussi, je
l'embrasse, je la remercie. Quelle heure il est, zut on n'a pas
regardé. 17h15, elle a dû naitre vers 17h05, c'est ce qu'on
indiquera.
Je
tiens mon bébé tout contre moi, le temps s'arrête. A. a l'air
toute zen, elle a de si beaux yeux...
Au
bout de ce qui me semble être 5 minutes, je vois ma SF qui commence
a s'inquièter. Ça fait déjà presque une heure me dit elle. Ah, le
placenta, je l'avais presque oublié celui la. Elle regarde, me dit
que ça ne saigne pas, que ça ne risque rien mais qu'il ne faudrait
pas qu'il tarde trop. Mon bébé ne réclame pas encore mais je décide de
la mettre au sein pour aider a la délivrance. Elle tête pour
la première fois! Wahou, j'avais hâte de redécouvrir ces
sensations. J'ai quelques contractions mais le placenta ne sort
toujours pas, j'essaie de me mettre debout, de pousser un peu mais il
ne vient toujours pas. Li Appelle Jak, SF expérimentée qui
m'a accompagné durant ma grossesse, elle lui explique la situation.
Il n'y a pas de risques d'hémorragie mais je sais que si le placenta
ne sort pas tout seul je vais devoir être transférée. Je ne
m'inquiète pas trop, Jak nous dit qu'elle est sur le route du retour
de Bordeaux et quelle arrive dans une demi heure. Quand elle arrive,
je suis tellement contente de la voir! Elle nous félicite, nous
embrasse. Et puis elle regarde le cordon, le placenta, confirme qu'il
n'y a pas de risques mais qu'il n'est pas encore décollé
entièrement.
Elle
me dit qu'elle va faire un geste désagréable, j'ai confiance en
elle. Elle va donc décoller mon placenta, m'appuie un peu sur le
ventre, c'est désagréable oui mais le placenta sort. Je suis
délivrée. Ouf!
On
va maintenant pouvoir démarrer notre vie a 4. V. part avec
Jak mettre le placenta dans un pot avec de la terre, on
l'enterrera plus tard au pied d'un arbre dans le jardin. Pendant ce
temps Li remet le salon en ordre pour accueillir E. V. part
la chercher. Elle peut enfin découvrir sa petite sœur! Nous
mangeons ensuite tous ensemble une paella surgelée que nous avions
acheté en prévision de la naissance. Je mets A. dans l'écharpe
pour la première fois. Que c'est bon d'être chez soi avec les gens
qu'on aime. Plus tard, Li nous laisse tous les 4, nous couchons E. et allons nous coucher nous aussi. On n'a pas dormi depuis 24h quand
meme! On fera tous une nuit complète jusqu'au lendemain!
Je m'attendais a un accouchement rapide et moins douloureux. J'ai l'impression que mon premier accouchement a l'hôpital était plus "facile". Comme quoi, c'est une vraie leçon pour moi, dans le domaine de la naissance rien ne de passe vraiment comme on l'a prévu. Pour en avoir beaucoup rediscuté avec les SF, il ne faut pas oublier le bébé dans l'histoire, il a son rythme, sa volonté propre, peut être qu'elle avait besoin de prendre son temps. Mais je suis heureuse d'avoir fait ce choix, celui de donner naissance à ma fille, dans ma maison. C'est tellement confortable de ne pas quitter son foyer, de retrouver son lit quand on en a envie, de vivre cet événement chez soi et de ne pas être séparée de mon aînée. Et surtout cet accompagnement respecteux dont j'ai bénéficié durant ces 9 mois de grossesse, pendant la grossesse et les mois suivant la naissance est vraiment une chance inouïe et j'espère de tout coeur que nous pourrons continuer en France à avoir le droit de choisir les conditions de naissance que l'on souhaite.
J'en ai eu les larmes aux yeux. Tellement beau et émouvant.
RépondreSupprimerC'est magnifique, extrêmement émouvant. J'espère aussi que les choses bougeront pour que les femmes puissent continuer de choisir comment elles veulent accueillir leur bébé!
RépondreSupprimerwaw ! moi aussi j'en ai eu les larmes aux yeux <3 Ton récit est très émouvant. Cependant j'ai une question, comment se passe les suites de couches ? comment est-on suivie les quelques jours qui suivent la naissance à la maison ? En espérant que les choses bougent ! bon dimanche.
RépondreSupprimerton récit était très joli ! j'ai accouché mardi avec la même sage-femme et pour nous aussi, c'était vraiment magique ! (et douloureux aussi :)
RépondreSupprimersuperbe recit, j'espere vivre ca egalement, peut etre la prochaine fois!
RépondreSupprimerMerci Maman Nature pour ce très doux témoignage.
RépondreSupprimerJuste magnifique. Une entrée dans ce monde en douceur et dans l'amour...
M'en vais de ce pas signer la pétition ;-)
Whaou !!!! Tu m'as fait pleurer de bonheur pour vous... L'AAD est le reve que j'ai pour mon 3eme enfant s'il vient un jour... Je trouve cela magique magnifique... Toutes mes félicitations !!!
RépondreSupprimerTrès beau, je pleure, mais tellement beau.
RépondreSupprimerFélicitations à vous :')
c'est tellement beau qu'on en a les larmes aux yeux à te lire... ça donne envie, mais je suis trop froussarde pour tenter l'aventure... peut être que j'oserai quand j'attendrai mon deuxième... ma première est née à 7 mois et demi à la clinique de l'Anjou; je ne me voyais pas être chez moi et de toute façon je n'aurai pas pu vu le terme... c'est une très belle histoire, et joliment racontée... bises Miffy
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