samedi 14 septembre 2013

La naissance de Mini-Pépette à la maison

Parce qu'aujourd'hui, plus que jamais, un vent froid souffle sur l'accouchement à domicile, j'ai envie de partager avec vous la naissance de ma deuxième petite fille. Parce que j'ai eu la chance d'être accompagnée par deux sage-femmes exceptionnelles, qui m'ont écoutée, soutenue, épaulée. Deux femmes, qui accompagnent jour après jour, de nombreux couples qui souhaitent mettre au monde leur enfant dans les conditions qui leur semblent les meilleures, au sein même de leur maison, si les conditions médicales le permettent, bien évidemment. Des femmes qui sont à l'écoute des femmes, des couples, des bébés. Des femmes qui font confiance aux femmes, dans leur capacité à mettre au monde leurs enfants. Des femmes qui ont  coeur de respecter nos choix, nos droits, notre corps et la physiologie de l'enfantement.

Ces femmes, elles sont une petite centaine en France, à travailler sans assurance, parce que la seule qu'on leur propose, c'est une assurance dont le montant est égal voire supérieur au montant annuel de leurs honoraires! Autant dire qu'on ne leur permet pas d'exercer. Aujourd'hui, elles sont menacées de cesser leur activité si elles ne s'assurent pas, ce qui est dans la grande majorité impossible. On nous priverait donc de ce droit de choisir librement les conditions de la naissance de nos enfants. C'est tout simplement inadmissible. Il nous appartient, à nous qui tenons à sauvegarder ce droit, de défendre haut et fort nos sage-femmes et de réclamer au gouvernement qu'il agisse afin qu'une assurance soit proposée aux sage-femmes libérales accompagnant les naissances à domicile à un tarif raisonnable et en rapport avec leurs revenus.

Je compte sur vous pour signer et relayer cette pétition:

***
Samedi 20 octobre 2012. Le jour de mon terme est arrivé. 9 mois que je te porte en moi. Je suis impatiente de te voir, les dernier jours me semblent longs. D'autant que je crains que notre projet d'accouchement a la maison ne puisse avoir lieu. Ma tension est assez haute depuis quelques jours, ma sage-femme me surveille de près et tous mes examens sont bons, j'espère donc pouvoir t'accueillir dans les conditions que nous avons choisi.

Comme convenu, nous nous rendons au CHU pour un contrôle. Je n'ai presque pas de contractions, le monitoring est parfait et ma tension n'est pas inquiétante. Je ne souhaite pas de TV (toucher vaginal) donc je ne sais pas où en est mon col mais bébé ne semble pas décidé a arriver aujourd'hui. En tous cas, la SF de l'hôpital nous assure qu'à priori rien ne nous empêche d'accoucher a la maison (sic). Je repars confiante!

L'apres midi, nous décidons de faire une balade dans le village tous les 3, ton papa, ta grande sœur et moi. Tout est calme, on ne croise presque personne, il ne fait pas très beau. On se promène assez longtemps. Tiens, quelques contractions me surprennent. Ca commencerait a bouger la dedans? On rentre a la maison, et de temps en temps, quelques contractions me demandent de m'arrêter quelques secondes. Je vais souvent aux toilettes, et dès que je m'assois, ça contracte assez fort. Je commence a perdre un peu de bouchon muqueux. Je me dis que c'est peut être pour aujourd'hui sans trop me faire d'idées. J'ai accouché apres terme pour ta grande sœur et je m'attends a devoir patienter encore quelques jours mais je suis tellement impatiente ! On profite de cette journée tous les 3. J'adore les premières sensations, les premières contractons, je me dis que tu t'apprêtes certainement a nous rejoindre, ça me met d'excellente humeur! Nous dinons tous les 3 (une raclette!) et j'imagine déjà que nous pourrions être 4 demain matin.

Après manger, on entame le rituel habituel, histoires, biberon et coucher d'E. Elle s'endort paisiblement. Mes contractions se font plus rapprochées, plus intenses tout en étant largement supportables. J'envoie un SMS a ma sage-femme, je lui dit que je pense que le travail démarre. On convient de se rappeler dans la soirée. Vers 22h, j'ai toujours des contractions, le travail ne faiblit pas, ça a l'air de vraiment se mettre en route. J'appelle la sage femme vers 23h. Je lui explique que je commence a avoir pas mal de contractions, elle me dit qu'elle ne me sent pas encore en travail. Elle me conseille d'essayer de dormir et de la rappeler si ça évolue. Je vais donc me mettre au lit. Une heure plus tard, je n'arrive pas a dormir, je suis assez excitée et j'ai régulièrement des contractions. Vers minuit je me relève donc et je commence a m'installer dans le salon. Lumière tamisée, bougies... Je dis a V. de se reposer mais il a envie de préparer l'espace avec moi, il prépare le matelas, le alèses et tout le matériel nécessaire pour accueillir le bébé. 

Vers 2h, je commence a regarder l'heure a chaque contraction et je me rends compte qu'elles sont espacées de 3-4 minutes et qu'elles m'obligent a m'arrêter. Je rappelle ma SF, elle me dit qu'elle me sent bien en travail et qu'elle se met en route. Elle me propose de prendre un bain, je lui dis que je n'en ai pas envie mais que je vais tester. Je me fais couler un bain, allume des bougies, monte le chauffage. Mais dans le bain, les contractions deviennent peu supportables, je me sens a l'étroit et je n'aime pas la position. Donc je sors rapidement. Je commence a chanter pour accompagner les contractions qui se font plus douloureuses maintenant, elles me lancent dans les reins. Je me félicite d'avoir suivi cet atelier de chant prénatal, chanter m'aide énormément! Mon homme m'appuie dans le bas du dos a chaque contraction, il sait exactement ou poser ses mains pour me soulager, quelle pression exercer. C'est bon de l'avoir près de moi, de savoir que l'on va mettre au monde cet enfant ensemble, a la maison. A chaque contraction, je suis debout, Appuyée contre le mur, c'est la seule position qui me convienne. Vers 4h, la SF arrive. Elle se joint a nous, je suis contente de l'avoir près de nous, elle est si douce et rassurante. Les contractions continuent leur danse régulière, pendant longtemps elles reviendront toutes les 1-2 minutes environ. J'avais espéré accoucher avant le matin mais je vois que le soleil se lève, l'ambiance change, j'aurais voulu rester dans cette ambiance feutrée, avec si peu de lumière. D'ailleurs, je ne veux pas ouvrir les volets, je tiens a rester dans la pénombre mais je crois que ce changement d'ambiance me perturbe. A 7h, E. se réveille. On appelle notre amie avec qui nous avions convenu de lui confier notre fille pendant l'accouchement si besoin. E. s'habille rapidement, elle demande a son papa ce que je fais. Mon homme lui répond maman chante pour faire sortir le bébé. Ma fille vient me faire un bisous et part avec son papa rejoindre notre amie et sa famille. Je me dis que quand elle reviendra elle découvrira sa petite sœur!

J'ai l'impression que le travail n'avance plus, les contractions s'espacent, diminuent en intensité. En fait j'alterne des phases de travail actives ou je sens que les choses avancent bien, que le bébé descend. Je fais des aller retour aux toilettes, je vomis trois ou quatre fois. Je me dis que c'est bon signe. Ma sage femme me rassure, c'est long mais bébé va bien, elle l'écoute régulièrement. Mon col est quasiment dilaté complètement. Plusieurs fois, ma SF sort son matériel pour accueillir bébé, puis le range. Parfois j'ai l'impression que le travail s'arrête complètement. On plaisante tous les 3 entre les contractions. Je me dis que c'est long, trop long! Pourquoi la poche des eaux ne se rompt pas? Pourquoi bébé ne descend pas plus vite? Pourquoi le travail semble s'arrêter a des moments? J'essaie différentes positions mais je ne suis bien que debout. Je commence a avoir mal dans les cuisses. Mon homme et la SF se relaient pour me masser le bas du dos pendant les contractions. A un moment, mon homme enlève l'horloge de la cuisine, quelle bonne idée, je ne me focalise plus sur le temps qui passe mais j'en ai marre que ce soit aussi long. Je veux accoucher aujourd'hui!!



Apres une pause a essayer de me reposer, je me dis que c'est trop, qu'elle doit sortir maintenant. Allez au boulot! Je me remet a marcher et le travail redémarre, plus intense, les contractions se rapprochent, deviennent beaucoup plus douloureuse quand tout a coup, crac! La proche des eaux se rompt, c'est parti! Wahou, c'est la tempête en moi, je débranche mon cerveau. Les contractions sont tellement fortes!!! Elles m'emmenent, se déchaînent, m'entrainent, je ne peux que les accepter en moi, me laisser emmener par toutes ces vagues, ne pas lutter, y aller avec elle. Mais ça fait tellement mal! Mais je sais que bientôt tu seras la! A un moment ça y est je le sens, ça commence a pousser, ma SF le voit et m'invite a me déplacée, je ne peux pas accoucher debout dans la cuisine, il faut que je revienne dans le salon sur le matelas, mais je j'ai plus rien a quoi m'accrocher sans le salon, je suis obligée de me mettre a 4 pattes car je suis trop fatiguee pour rester debout (position qui me permettait de mieux supporter la douleur) et là je commence a pousser. Ça y est tu dois venir bébé, viens, ça pousse, c'est si fort, si violent. Ça pousse et je pousse aussi fort que je peux, bébé descend doucement. Allez viens ! Pourquoi c'est si long ?

 Bientôt je sens que tu passes en moi, ça brûle, ça fait mal: « laisse-toi traverser » me dit ma SF. Et c'est ce que je fais. Je te laisse me traverser pour sortir de moi, la tête, puis bientôt les épaules et flop tout ton corps qui glisse dans les mains de ma SF. La douleur m'a un peu assommé et je mets quelques secondes avant de retrouver mes esprits et te prendre dans les bras. Mon petit corps tout chaud, mon bébé, mon amour. Je regarde mon homme et je lui dis: on l'a fait mon amour! Je le vois fourbu, fatigue mais heureux. Ça y est, on t'a accueilli a la maison, comme on le voulait. On s'embrasse, on est heureux. 

Je vois ma SF les yeux embuées, elle est très émue elle aussi, je l'embrasse, je la remercie. Quelle heure il est, zut on n'a pas regardé. 17h15, elle a dû naitre vers 17h05, c'est ce qu'on indiquera.
Je tiens mon bébé tout contre moi, le temps s'arrête. A. a l'air toute zen, elle a de si beaux yeux...

Au bout de ce qui me semble être 5 minutes, je vois ma SF qui commence a s'inquièter. Ça fait déjà presque une heure me dit elle. Ah, le placenta, je l'avais presque oublié celui la. Elle regarde, me dit que ça ne saigne pas, que ça ne risque rien mais qu'il ne faudrait pas qu'il tarde trop. Mon bébé ne réclame pas encore mais je décide de la mettre au sein pour aider a la délivrance. Elle tête pour la première fois! Wahou, j'avais hâte de redécouvrir ces sensations. J'ai quelques contractions mais le placenta ne sort toujours pas, j'essaie de me mettre debout, de pousser un peu mais il ne vient toujours pas. Li Appelle Jak, SF expérimentée qui m'a accompagné durant ma grossesse, elle lui explique la situation. Il n'y a pas de risques d'hémorragie mais je sais que si le placenta ne sort pas tout seul je vais devoir être transférée. Je ne m'inquiète pas trop, Jak nous dit qu'elle est sur le route du retour de Bordeaux et quelle arrive dans une demi heure. Quand elle arrive, je suis tellement contente de la voir! Elle nous félicite, nous embrasse. Et puis elle regarde le cordon, le placenta, confirme qu'il n'y a pas de risques mais qu'il n'est pas encore décollé entièrement.

Elle me dit qu'elle va faire un geste désagréable, j'ai confiance en elle. Elle va donc décoller mon placenta, m'appuie un peu sur le ventre, c'est désagréable oui mais le placenta sort. Je suis délivrée. Ouf!

On va maintenant pouvoir démarrer notre vie a 4. V. part avec Jak mettre le placenta dans un pot avec de la terre, on l'enterrera plus tard au pied d'un arbre dans le jardin. Pendant ce temps Li remet le salon en ordre pour accueillir E. V. part la chercher. Elle peut enfin découvrir sa petite sœur! Nous mangeons ensuite tous ensemble une paella surgelée que nous avions acheté en prévision de la naissance. Je mets A. dans l'écharpe pour la première fois. Que c'est bon d'être chez soi avec les gens qu'on aime. Plus tard, Li nous laisse tous les 4, nous couchons E. et allons nous coucher nous aussi. On n'a pas dormi depuis 24h quand meme! On fera tous une nuit complète jusqu'au lendemain!

Je m'attendais a un accouchement rapide et moins douloureux. J'ai l'impression que mon premier accouchement a l'hôpital était plus "facile". Comme quoi, c'est une vraie leçon pour moi, dans le domaine de la naissance rien ne de passe vraiment comme on l'a prévu. Pour en avoir beaucoup rediscuté avec les SF, il ne faut pas oublier le bébé dans l'histoire, il a son rythme, sa volonté propre, peut être qu'elle avait besoin de prendre son temps. Mais je suis heureuse d'avoir fait ce choix, celui de donner naissance à ma fille, dans ma maison. C'est tellement confortable de ne pas quitter son foyer, de retrouver son lit quand on en a envie, de vivre cet événement chez soi et de ne pas être séparée de mon aînée. Et surtout cet accompagnement respecteux dont j'ai bénéficié durant ces 9 mois de grossesse, pendant la grossesse et les mois suivant la naissance est vraiment une chance inouïe et j'espère de tout coeur que nous pourrons continuer en France à avoir le droit de choisir les conditions de naissance que l'on souhaite.



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